La recherche
Exposition au soleil entre 6 et 15 ans et risque de développer une SEP
A propos de l'article de I. van der Mei et collaborateurs (British Medical Journal, 9 août 2003, vol 327 : pages 316-320).
Le SEP se déclare par un concours d'influences provenant de l'environnement d'une part, et de facteurs héréditaires de susceptibilité, d'autre part. Différents gènes (porteurs de nos caractéristiques héréditaires) semblent jouer un rôle dans le risque de développer une SEP, mais seulement quelques-uns sont connus. Les personnes porteuses d'un ou plusieurs de ces gènes, et de ce fait susceptibles de souffrir de la SEP, ne développeront la maladie que si elles sont soumises à certaines influences de l'environnement qui provoquent la SEP.
Il pourrait s'agir de certaines infections virales, de produits toxiques, de carences dans l'alimentation ou d'autres facteurs encore inconnus. C'est pourquoi la découverte d'Ingrid van der Mei, qu'un manque d'ensoleillement peut jouer un rôle dans l'origine de la SEP, est intéressante même si nous devons ajouter que d'autres chercheurs avaient déjà des indications allant dans la même voie.
Ingrid van der Mei et ses collaborateurs ont questionné en Tasmanie, une île proche de l'Australie, 136 personnes atteintes de SEP et 272 personnes en bonne santé, de même âge et de même sexe, sur leurs modes de vie et les événements vécus dans leur passé. Les questions portaient surtout sur l'exposition au soleil au fil des années (moins d'une heure par jour, 1 à 2 heures, 2 à 3 heures, 3 à 4 heures, plus de 4 heures). Une exposition faible correspondait à une moyenne journalière en dessous de 2-3 heures, une exposition élevée à une moyenne journalière au-dessus de 2-3 heures. Les données des patients SEP ont été ensuite comparées à celles des personnes interrogées n'ayant pas la SEP.
La comparaison a démontré qu'une exposition élevée au soleil, durant la période de 6 à 15 ans, diminuait de plus de la moitié le risque de développer plus tard une SEP. L'ensoleillement durant les mois d'hiver semblait avoir le plus d'effet préventif. Il est intéressant de noter qu'à un âge plus avancé, et plus précisément durant les 10 ans précédant le début de la SEP, l'exposition au soleil n'avait plus d'influence sur le risque de développer une SEP.
Les résultats de l'enquête sont confortés par des constatations faites dans une autre partie de l'étude : les personnes atteintes de SEP avaient moins de dommages cutanés provoqués par le soleil que les autres personnes de l'étude non atteintes de SEP.
Cette étude a été élaborée très soigneusement et paraît très convaincante mais le dernier mot n'a naturellement pas encore été dit. Des personnes critiques ne manqueront pas de faire remarquer qu'on peut mettre en doute la fiabilité de la mémoire sur le degré d'exposition au soleil durant sa jeunesse et son adolescence. Essayez vous même de vous le rappeler. A ceci on peut répondre que cette étude n'est pas unique et que des résultats d'études antérieures suggéraient déjà l'influence de l'ensoleillement. Ces études auront pour conséquence que l'on va intensifier les recherches portant sur l'effet des rayons UV sur l'immunité, via peut-être la vitamine D et sa forme active, la 1,25 dihydroxy-cholecalciferol.
Bien évidemment, exposer les enfants à plus de soleil n'a pas seulement un effet protecteur possible contre la SEP, mais pourrait avoir aussi un effet nocif par un risque plus élevé de cancer de la peau. Personne n'osera conseiller de s'exposer plus au soleil étant donné qu'il n'est pas possible actuellement de dire si les avantages l'emportent sur les inconvénients.
Il est aussi intéressant de noter que l'étude de van der Mei a uniquement examiné l'importance de l'ensoleillement dans la prévention de la SEP. Que le soleil ait une influence sur l'évolution de la maladie chez les personnes déjà atteintes de SEP n'a jamais encore été examiné.
On peut aussi rapprocher les observations rapportées dans cet article avec celles faites lors d'études sur les migrants, montrant que le risque de développer une SEP était acquis vers l'âge de 15 ans, et aussi avec la prévalence de la maladie dans l'hémisphère nord, plus élevée dans les pays du Nord que dans ceux du Sud, plus ensoleillés.
HC - Janvier 2004